DES CRÉATIONS ORIGINALES: LES POUDRES D'ÉPICES OLIVIER ROELLINGER ®

Depuis l’enfance, les chants de marins, les récits du Cap Horn, des Terres Neuvas et des chasseurs d’épices de la Compagnie des Indes ont nourri mon imaginaire comme plus tard, la littérature maritime et d’aventures a continué à étancher ma soif de l’ailleurs et de la rencontre de l’autre. Cuisinier, je me suis passionné pour ces épices déjà présentes dans les murs de la cité corsaire au XVIIème et XVIIIème, épices d’Orient et du Nouveau Monde. J’ai voyagé avec Jane aux quatre coins du globe en reprenant les routes des grandes familles d’armateurs malouins. Nous avons hanté les côtes d’Amérique du Sud, les Caraïbes, l’Océan Indien, les Mascareignes, les côtes Malabar, les Moluques, l’Asie du Sud-Est et la côte Africaine. J’ai utilisé les épices que je rapportais comme les autres navigateurs de ce pays ont pu le faire avant moi mais en me nourrissant de l’imaginaire qu’elles portent en elles. Un peu comme des graines d’un paradis perdu, d’un jardin d’Eden.

Quel que soit l’endroit de la planète, les épices sont très rarement utilisées seules, il s’agit toujours d’un mélange de 3 à 20 d’entre elles. En ce qui me concerne, je n’ai jamais voulu reproduire un garam massale ou un curry à la créole ou à l’indienne mais plutôt construire une saveur nouvelle comme un nez le ferait pour créer un parfum. Et cette saveur inédite, cette « poudre d’épices » serait dédiée à un produit ou à un plat précis, comme la tomate, un poisson ou un dessert.

Cette construction de saveurs se fait avec beaucoup de maîtrise et de précision. Je cherche longtemps, je tente des expériences, recommence plusieurs fois. Puis les années passent, ce rêve s’installe dans ma mémoire et je peux un jour imaginer des saveurs en associant épices et herbes sans les goûter… Puis je joue, je compose, je construis à partir de ce que la nature nous a donné : des épices de feu, - les piments, le gingembre, les poivres, les faux poivres -, des goûts de bonbons à l’anis - l’aneth, le fenouil le petit et le gros, la fenouillette, l’anis étoilé ou la badiane -, les tendres - les vanilles, la muscade, le macis, le rocou, le benjoin -, les caractériels - le girofle, le bois d’Inde -, les hespéridés - la citronnelle, les pétales de lys -, les thymols - l’ajowan -, les magnifiques - les coriandres et les cardamomes vertes noires ou blanches -, et encore et encore… Et puis je devine, je dessine, je vois naître la poudre.

Ensuite, comme au XVIIIème siècle, la Maison du Voyageur à Cancale me sert à créer, entreposer mais aussi travailler les épices. Dans le cœur des Maisons de Bricourt, nous recevons les épices brutes, sélectionnées parmi les plus belles origines et avant de les stocker au sec, nous les contrôlons en laboratoire. Dans cet entrepôt, elles sont alors étuvées, torréfiées, broyées, moulues, pesées, dosées, mélangées pour obtenir nos « poudres d’épices».